Se brosser les dents pour garder un cœur sain
Des
chercheurs du NIH (USA) ont mis en évidence une corrélation entre la
présence de micro-organismes responsables d'une parodontite et
l'épaisseur de la paroi de la carotide, qui est un bon indicateur
d'athérosclérose.
L'idée selon laquelle la flore
buccale contribue aux maladies cardiovasculaires n'est pas neuve. Elle
date du début du siècle passé. Cette théorie, qui était alors connue
sous le nom de «théorie de l'infection focale», avait néanmoins été
abandonnée à la fin des années 30, mais depuis une dizaine d'années,
elle a à nouveau le vent en poupe. «De nombreuses études
épidémiologiques ont montré une corrélation entre l'infection et
l'inflammation des gencives et des mâchoires d'une part, et les
maladies cardiovasculaires d'autre part, explique Moïse Desvarieux (University of Minnesota, USA). Mais
le caractère fondamental du rôle des micro-organismes pathogènes n'est
apparu dans aucune des études. Les chercheurs se sont plutôt penchés
sur des paramètres indirects, comme la perte de dents, la profondeur de
l'alvéole, ou la destruction osseuse.» C'est pourquoi, quatre groupes de recherches appartenant au NIH (National Institutes of Health) ont démarré l'étude Invest (Oral Infections and Vascular Disease Epidemiology Study).
Parmi les 657 volontaires sélectionnés, des prélèvements buccaux ont
été effectués chez les adultes les plus âgés de façon à étudier leur
flore bactérienne. Par la même occasion, l'épaisseur de leur paroi
carotidienne a été mesurée. Selon Desvarieux, celle-ci constitue un bon
indicateur de la présence d'une athérosclérose sub clinique. Cinq
souches bactériennes semblaient être associées à un épaississement de
la paroi carotidienne. Ces bactéries sont les suivantes: Actinobacillus actinomycetemcomitans, Porphyromonas gingivalis, Tannerella forsythia, Treponema denticola et Micromonas micros.
Par ailleurs, la contribution de ces bactéries au développement d'une
athérosclérose est restée statistiquement significative après
correction pour d'autres facteurs de risque comme le tabac et le
diabète. «Ce sont les quatre premiers micros-organismes qui sont les plus importants, précise Desvarieux, parce qu'ils sont généralement considérés comme les initiateurs de la parodontite.» L'œuf et la poule Cette première phase de l'étude Invest a été publiée dans la revue Circulation (111:576-582),
mais l'étude n'en est encore en fait qu'à son stade initial. Les
participants de cette étude devront être suivis tous les trois ans sur
une période de 10 à 20 ans. «Cette stratégie est importante pour résoudre une polémique du type de l’œuf et de la poule, continue Moïse Desvarieux. En
effet, nous ne pouvons affirmer avec certitude que l'infection
chronique et l'inflammation de la gencive et de la mâchoire débouchent
sur de l'athérosclérose entraînant des formes cliniques de maladies
cardiovasculaires dans un second temps. Il est vrai que c'est
l'hypothèse à laquelle nous avons toujours adhéré, mais sur le plan
théorique, le contraire est également possible: à savoir que
l'épaisseur de la carotide soit responsable de la parodontite. Seule
une étude longitudinale de type épidémiologique, comme celle que nous
appliquons dans l'étude Invest sera à même d'apporter une réponse
définitive à cette question.» LEGENDE: La théorie dite de l'infection focale a à nouveau le vent en poupe depuis une dizaine d'années.
Peter Raeymaekers
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