En ce jour de commémoration de la fin de la Guerre 1914-1918, rappelons-nous avec cet article le rôle important qu’ont joué certains « auxiliaires » de guerre :
Savez-vous qu’il existe à Lille et à Charleroi, en Belgique, des monuments rendant hommage aux pigeons voyageurs ? Ceux-ci ont effet joué un rôle clé lors des combats de 1914-18 en remplaçant le téléphone, le télégraphe ou l’estafette, lorsque ces moyens de communication étaient indisponibles. Un épisode méconnu de l’histoire militaire.
En 1914, la colombophilie militaire en est encore, en France, à ses balbutiements. Des colombiers sont certes installés dans les places militaires de l’est de la France, la cavalerie dispose de pigeons dans des paniers, mais rien n’est véritablement organisé. Tout change, à partir de 1915, lorsque le conflit s’enlise pour trois ans dans une guerre de position et de tranchées. Dès lors, les pigeons deviennent indispensables : échappant facilement aux tirs, aux bombardements et aux nappes de gaz, les volatiles assurent la liaison entre les premières lignes et le commandement, en risquant moins de se perdre qu’un agent de liaison.
En 1916, on compte ainsi déjà 10 000 pigeons réquisitionnés, ainsi que des dizaines colombiers mobiles : il peut s’agit de bus à impériale spécialement aménagés conduits par un chauffeur colombophile ou encore de remorques sur chassis, pouvant contenir jusqu’à 100 oiseaux. L’usage de ces véhicules est indispensable, dans la mesure où des colombiers fixes seraient systématiquement pris pour cible et détruits par l’ennemi. Toutefois, leur usage n’est pas idéal : chaque déplacement perturbe les oiseaux, entre les bruits de moteur, les combats et les conditions climatiques. De ce fait, une fois le colombier mobile à destination, une période d’interruption de service de trois jours (dite “d’adduction”) doit être observée avant que les pigeons ne soient de nouveau opérationnels.
Pour ce qui est des messages, ils consistent en des “colombogrammes”, c’est-à-dire des papiers pelures fournis par l’administration, pré-casés pour organiser les informations (expéditeur, destinataire, heure du lâcher, message) que l’on enroule dans un tube en plume d’oie ou en aluminium, puis que l’on fixe à l’aile du volatile. Au début du conflit, les colombogrammes sont rédigés en clair… jusqu’à ce qu’on s’aperçoive que les Allemands ont formé des tireurs d’élite pour abattre les oiseaux. Dès lors, on prend soin de coder les informations et on entraîne par ailleurs certains pigeons au vol de nuit – alors que ce volatile craint par nature l’obscurité. Contre toute attente, le résultat de cette expérience est un succès.
Parmi les milliers de volatiles ayant participé aux combats, certains accèdent à la célébrité. C’est le cas de Vaillant, le dernier pigeon du fort de Vaux, que l’on lâche le 4 juin 1916 avec un ultime message du commandant Raynal, dont les troupes sont encerclées : « Nous tenons toujours, mais nous subissons une attaque par les gaz et les fumées très dangereuses. Il y a urgence à nous dégager. Faites-nous donner de suite toute communication optique par Souville, qui ne répond pas à nos appels. C’est mon dernier pigeon. » Gravement intoxiqué par les gaz de combat, Vaillant arrive au colombier de la citadelle de Verdun où il meurt en délivrant son message, ce qui lui vaut le privilège d’être cité à l’Ordre de la Nation.
Aujourd’hui, peu nombreux sont les colombogrammes qui ont traversé le temps et se trouvent en mains privées : ils constituent donc des objets de collection très recherchés.
Plus fréquentes, mais tout aussi intéressantes du point de vue historique, sont les cartes postales d’époque rendant hommage aux “pigeons soldats” : elles constituent une passionnante thématique de collection, accessible pour un budget modéré.
A lire : La Poste pendant la Première Guerre mondiale, de Laurent Albaret de PHILAPOSTEL, aux éditions Yvert et Tellier, d’où sont issues la majorité des informations de cet article.
Source : Historia.fr