PHILAPOSTEL Bretagne vous propose de vous conter en 4 épisodes cette tragique aventure qui, bien qu’ayant fortement marqué l’histoire des TAAF, reste souvent méconnue du grand public. C’est après avoir recueilli et regroupé divers documents et informations sur le sujet (voir les sources en fin d’article) que je suis en mesure de vous la présenter aujourd’hui.
Après avoir découvert l’Ile Saint Paul et l’épopée des frères Bossière, puis écouté le récit de la tragique histoire des « Oubliés », intéressons-nous aujourd’hui au Navire ravitailleur « Ile Saint Paul » qui joua également un rôle dans cette histoire.
Au retour de l’Austral en mai 1930, les sociétés des frères Bossière affichent des résultats très déficitaires ; la campagne phoquière de Pêches Australes à Kerguelen a été très médiocre, ainsi que celle de la « Langouste Française » à Saint Paul, même si pour cette dernière, l’avenir semble prometteur. Les actionnaires sollicités ne veulent plus financer et les deux frères sont contraints de s’en remettre à la Banque de l’Union Parisienne qui prend ainsi le contrôle des sociétés et impose des restructurations très discutables.
Jusqu’ici, le navire usine Austral assurait l’acheminement des langoustiers à Saint Paul et leur retour en France avec la production lors de sa campagne phoquière annuelle à Kerguelen. Cela permettait des économies en dépit d’inconvénients certains dont celui de rendre les deux sociétés dépendantes l’une de l’autre. La banque décide d’affecter l’Austral uniquement à l’activité phoquière à Kerguelen et d’acheter pour la « Langouste Française » à Saint Paul son propre navire. Il est en outre décidé que l’activité de l’usine langoustière serait permanente et que le navire assurerait la relève des personnels, le ravitaillement et le transport de la production.
C’est ainsi qu’en juillet 1930 est acheté à une compagnie maritime d’Oran un cargo de 24 ans d’âge, le Michel Mazella qui faisait du transport de fret entre l’Algérie, le Maroc et les ports français. Ce navire de 3 500 tonnes, de 64 m de long et jaugeant 1 064 tonneaux est rebaptisé Ile Saint Paul, et son commandement confié au capitaine Philippe d’Armancourt.
Toutes ces restructurations ont retardé le départ des navires et ne seront pas sans conséquences sur la suite des évènements. L’ Ile Saint Paul quitte le Havre le 18 octobre 1930 avec des pêcheurs bretons et le directeur de l’usine Pierre Presse. Après des escales à Djibouti, Tamatave où il embarque des ouvriers et ouvrières malgaches, puis à la Réunion, il atteint Saint Paul le 6 décembre 1930. Tous découvrent alors le drame des gardiens de l’usine laissés sur place lors de la campagne précédente en mars 1930 ; sur les 7 gardiens, 4 sont décédés du scorbut. Il est néanmoins décidé de relancer l’activité de l’usine. L‘île Saint Paul après avoir débarqué personnels et matériels repart sur Diégo-Suarez où il doit embarquer un chargement de charbon pour ravitailler à Kerguelen l’aviso Antarès qui effectue une mission de souveraineté dans les îles Australes.
Le navire fait de nouveau escale à Saint Paul du 17 au 20 janvier 1931 avec à son bord le directeur de la « Langouste Française » Alfred Caillé et le géologue Edgar Aubert de la Rüe accompagné de son épouse, et qui doit effectuer une mission scientifique à Kerguelen. Le 27 janvier 1931, I’lle Saint Paul retrouve à Kerguelen l’Austral et l’Antarès. Puis, à quelques jours d’intervalle, l’Antarès et l’Ile Saint Paul font route sur Madagascar via l’île Saint Paul les 10 et 20 février où ils constatent le bon état sanitaire des langoustiers et l’intense activité de l’usine.
Mais peu après leur passage, le béribéri se déclare parmi le personnel de l’usine provoquant la mort de plusieurs ouvriers malgaches. En raison de la gravité et de l’urgence de la situation, et du fait que la venue de l’Ile Saint Paul depuis Madagascar serait trop longue, ordre est donné à l’Austral d’interrompre sa campagne à Kerguelen et de se porter immédiatement au secours des langoustiers. L’Austral évacue rapidement le couple Aubert de la Rüe et les bergers de Port Couvreux et arrive à Saint Paul le 4 avril 1931. Même si le médecin de l’Austral peut sauver de nombreux malades, la situation est telle qu’il est décidé de fermer l’usine et de rapatrier tous les personnels sur Tamatave (Madagascar).
Avec 48 morts dont les 4 gardiens décédés durant l’hiver, le scandale est énorme. Par ailleurs la société ne peut plus faire face à ses dettes et toute reprise d’activité est exclue ; elle est mise en liquidation le 29 juin 1932. C’en est fini du rêve des Bossière dans les îles Australes.
De retour en France, l’Austral est vendu ; quant à I’lle Saint Paul, après avoir effectué quelques transports de fret entre Madagascar, Maurice et la Réunion, il est désarmé au port de la Pointe des Galets à la Réunion le 29 août 1932. Il est vendu aux enchères publiques par le tribunal de St Denis le 20 mars 1935 pour la somme dérisoire de 5 200 fr. Après avoir été livré aux ferrailleurs, la carcasse du navire est coulée en rade de Saint Paul à la Réunion.
A suivre : les « Ouliés de Saint Paul », et maintenant ? Dès demain !
Voir aussi : les nouvelles maritimes d’Ouest Eclair
Article élaboré à partir d’informations et de documents de :
- Wikipedia
- Ouest-France et Le Télégramme
- Maryvonne Tateossian Le Huludut
- Jean Michel Bergougniou
- Fabrice Tual
- Pierre Couesnon
- Le site http://transpolair.free.fr
- Le site http://www.philateliedestaaf.fr
- Le groupe facebook : https://www.facebook.com/groups/363699360410692/
- Le blog http://lesoubliesdelilesaintpaul.over-blog.com/