Les Grattophiles
Savez-vous que des personnes collectionnent les tickets à gratter ? Rencontre avec ces grattophiles – une centaine en France -, qui viennent d’être réunis pour la première fois.
Il en exhibe des ronds, des rectangles, des ronds et rectangles à la fois… tous à la gloire du Millionnaire. Bruno, 26 ans, collectionne tous les modèles du célèbre ticket à gratter qui, à une époque et à condition de voir apparaître les trois symboles TV, offrait le privilège d’aller tourner la roue sur TF 1 aux côtés de l’animateur Philippe Risoli. « Je ne suis pas du tout joueur, je suis le seul client qui investit dans un ticket dans l’optique de perdre, juste pour pouvoir l’ajouter à ma collection », sourit cet infographiste de Limeil-Brévannes (Val-de-Marne), 3 pin’s Millionnaire accrochés à son veston.
Comme lui, ils sont une dizaine de collectionneurs de jeux de grattage à avoir été invités en cette semaine de novembre sur le site de la Française des jeux (FDJ) à Moussy-le-Vieux (Seine-et-Marne). Une première. « Ce sont pour nous des ambassadeurs, ils valorisent nos marques à travers notamment leurs expos ou leurs sites Internet », se félicite Christine Da Silva, chargée d’études à la FDJ. L’Hexagone compte une centaine de grattophiles accros aux premières séries d’Astro, aux sésames ayant un défaut d’impression ou une faute d’orthographe, aux spécimens destinés aux commerciaux… « J’ai rencontré mon docteur, il m’a dit : La collectionnite aiguë, ça ne se soigne pas. Alors je continue », se marre Jean-Claude, 70 ans, qui possède les premiers Banco et 421.
Le « graal » de ces passionnés, c’est la Carte 6 Jeux qui, sur un même ticket, proposait dans les années 1990 moyennant 50 francs un Morpion, un Poker plus, un Black Jack… L’un d’eux était forcément gagnant. Résultat : pour pouvoir encaisser leur gain, les clients les remettaient aux buralistes qui, à leur tour, les détruisaient, d’où leur rareté. Patrick a réussi à mettre la main dessus. Il détient aussi un exemplaire du Cash 100 000, le tout premier ticket apparu dans l’Hexagone, en 1989. Mais sa plus belle prise, c’est le Grimoire.
« Il a été imprimé mais jamais distribué, interdit à la vente par les autorités au nom du jeu responsable car il était trop enfantin, trop proche de l’univers de Harry Potter », décrypte-t-il. A la différence des montants astronomiques qu’ils font miroiter, tous ces morceaux de carton n’ont pas une grande valeur financière sur le marché de la collection. Quelques dizaines d’euros au maximum.
« Entre nous, on préfère se les échanger », souligne Xavier, 57 ans, chauffeur de bus. Sa pépite la plus convoitée ? Un Astro de la série 38206, retirée des présentoirs « pour une raison inconnue ». Ses tickets à lui n’ont jamais été grattés. Sous la fine couche de vernis se cache donc peut-être une somme colossale. Pas question pour lui de savoir. « Un ticket, c’est une œuvre d’art. Le gratter, ça m’arracherait les tripes », prévient-il. De toute façon, même s’il passait à l’acte, il ne pourrait prétendre au pactole. Les gains ne sont en effet plus délivrés environ six mois après la commercialisation des lots.
Les trésors d’Eric et de Claudine, un couple de quinquagénaires de Laval (Mayenne), eux, ont subi la friction d’un ongle. « Depuis vingt ans, on fait de la récup chez les détaillants FDJ », lâche monsieur, qui se retrousse les manches dans une collectivité territoriale. « Oui, on fait les poubelles ! » poursuit, hilare, madame, qui travaille « aux finitions » dans une imprimerie. Ils sont aussi à l’affût des tickets événementiels distribués lors de la tournée des plages de la FDJ. Ce qui fait la rareté du produit est parfois étonnant. « Sur un jeu XIII, le nom de l’imprimeur n’est pas indiqué, il y a une rosace à la place », s’étonne Eric. Au total, il possède 15 000 pièces, conservées dans des dizaines de classeurs. Ainsi, la chambre « du fiston, qui est grand maintenant, a été recyclée ! ».
Un Musée des jeux à gratter en Seine-et-Marne
C’est une caverne d’Ali Baba qui abrite les sphères historiques contenant les boules du Loto, un distributeur automatique de Banco ça banque illico ou la véritable roue du Millionnaire, celle qui tournait tous les dimanches midi sur les petits écrans juste avant « le Juste Prix ». Bienvenue dans la «salle du patrimoine», deux pièces dans les sous-sols du site historique de la FDJ à Moussy-le-Vieux (Seine-et-Marne) occupé aujourd’hui essentiellement par les services de comptabilité. Ce musée interne renferme également dans des centaines de tiroirs tous les modèles de tickets à gratter pérennes ou éphémères mis sur le marché depuis 1989.
Araignée de la chance
Parmi eux, l’Araignée de la chance de la Pacifique des jeux, écoulée uniquement en Polynésie. La Loterie nationale est également représentée, à l’instar des affiches publicitaires d’antan ou des premières tranches de billets émises en 1933. Le piano utilisé lors des tirages de l’époque est exposé. Ce fabuleux trésor n’est pas ouvert au grand public. « Mais on aimerait le montrer un peu plus, pourquoi pas lors de visites organisées », suggère un employé de la FDJ.
Source : LeParisien
Chapeau au collectionneur qui ne gratte pas les « jeux a gratter » il a peut-être une petite fortune périmée
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