Le ballon monté « Ville d’Orléans » #2

Après les « griffes Tram« , nos amis belges du CRPJ (Cercle Royal Philatélique de Jemeppe sur Meuse, près de Liège) nous proposent une étude très complète sur le ballon monté « Ville d’Orléans ». Voici la suite du premier épisode.

Le 27 septembre 1870, un avis du Directeur général des Postes reproduisant les dispositions des deux décrets précédents, complète certains articles.

L’article 2 du premier décret précise :

  1. Le poids des lettres expédiées par les aérostats ne devra pas dépasser 4 grammes.
  2. La taxe à percevoir pour le transport de ces lettres reste fixée à 20 centimes.
  3. L’affranchissement au moyen de timbres-poste en est obligatoire.

Et précise en remarque que : les lettres fermées que le public entendra réserver pour être acheminées par les ballons montés devront porter sur l’adresse la mention expresse : « par ballons montés », etc.

Il faut savoir que les premiers Ballons ne portaient pas de mention « par ballon monté », le public n’étant pas encore informé des nouvelles dispositions prises pour la transmission du courrier.

L’article 3 du second décret précise le tarif des cartes-poste :

  1. a) 10 centimes à destination de la France et de l’Algérie, et 20 centimes pour l’étranger.
  2. b) L’affranchissement au moyen d’un timbre-poste en est obligatoire.
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le canon pivotant Krupp

Les départs se font de jour comme de nuit, essuyant les tirs de barrage des troupes prussiennes. Bismarck est agacé par ces aéronefs qui glissent dédaigneusement au-dessus de sa tête et déclare que tout voyageur employant ce moyen de transport et tombant entres ses mains sera jugé par un conseil de guerre, c’est-à-dire passé par les armes.

Il s’adresse aussi au roi du fer allemand, Alfred Krupp, et lui demande d’imaginer une arme spéciale contre ces ballons. Celui-ci fabrique alors un canon pivotant, monté sur un chariot, qui peut se dresser verticalement et atteindre, suivant l’inventeur, sa cible, à 2000 pieds de haut. Mais ce canon ne sera guère plus efficace que les fusils.

Le « Ville-d’Orléans »

Ballon ainsi nommé suite à la victoire l’armée de la Loire lors de la bataille de Coulmiers et la libération (temporaire) de la ville d’Orléans.

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Pigeongramme historique : victoire de Coulmiers

Le jeudi 24 novembre 1870 (67ème jour du Siège) à 23:45 hrs depuis la gare du nord avec à son bord l’aéronaute Paul Rolier (ingénieur civil), comme passager Léonard Beziers (franc-tireur) et six pigeons, le ballon s’élève dans le ciel. Le « Ville-d’Orléans » emporte quatre sacs de correspondance pesant au total entre 230 et 250 kilos. Après un vol de 14:45 hrs, le lendemain il arrive à Lifjeld (Montlid) en Norvège après avoir parcouru 1246 km (un record mondial de distance).

Le périple

Après avoir sillonné l’espace ténébreux pendant toute une longue nuit d’hiver, Rolier et son compagnon de voyage atteignent enfin l’heure du lever du soleil. Ce roulement persistant entendu durant toute la nuit est identifié, c’est la mer, l’immensité de celle-ci se révèle à perte de vue ! Leur boussole leur indique la direction du Nord. Après plusieurs heures consécutives, ces malheureux, gelés de froid, regardant fixement la vaste étendue des flots aperçoivent une goélette. Ils lui font des signaux et celle-ci manœuvre pour se placer dans leur sillage. Se rapprochant dangereusement des flots et emporté par la vitesse prodigieuse des vents, Rolier comprend qu’ils ne pourront être sauvés par ce bateau. Afin d’alléger le ballon, ils doivent se délester d’un sac de courrier afin de reprendre de l’altitude.

Vers 14:20 hrs, le pilote aperçoit la cime d’un sapin. Enfin la terre ! Rolier tire la corde de la soupape et les deux compagnons s’apprêtent à sauter. Arrivés au sol, nos deux aventuriers voient leur aérostat reprendre de l’altitude et disparaître.

Des heures de marche dans la neige, transis de froid et tiraillés par la faim, une nuit à l’abri d’une cabane abandonnée et enfin des traces, signe de vie, l’espoir renaît.

Recueillis par deux hommes, ils comprennent qu’ils sont en Norvège. Conduits à la ville de Christiana, ils ont la surprise d’y retrouver leur transport, son contenu intact et leurs six pigeons ; c’est à plus de 100 kilomètres de l’endroit où ils l’ont quitté que le « Ville-d’Orléans » s’est posé, près d’une ferme à Tunet.

Le sac de dépêches jeté à la mer fut aperçu par l’équipage du navire et repêché. Il est remis par le capitaine à l’agent consulaire à Mandal. Tout le courrier est sauvé.

Signalons que les sacs ont été réexpédiés de Norvège sans avoir été ouverts. En conséquence, aucun cachet norvégien ne figure sur les correspondances qui en proviennent.

Les pigeongrammes

Nombreux sont les ballons qui avaient des pigeons à leur bord. Ces volatiles furent les seuls messagers efficaces de transport d’informations de la province vers Paris durant le siège.

VilleOrleans05Les télégrammes destinés à Paris étaient centralisés à Tours. Ils étaient condensés une première fois par typographie et assemblés tels les colonnes d’un journal. Puis ils étaient photographiés et microfilmés.

Un seul pigeon peut transporter environ 20 pellicules dans de petits tubes fixés à la plume maîtresse de la queue soit 15 000 messages privés ou l’équivalent de 500 pages de dépêches officielles.

VilleOrleans06A l’arrivée, les courriers étaient amplifiés à l’aide de microscopes électriques, recopiés et expédiés aux destinataires.

115.000 dépêches officielles et plus d’un million de correspondances privées auraient ainsi été aéropostées. Beaucoup de pigeons ne revinrent jamais, égarés par les intempéries, victimes de faucons amenés par les Prussiens ou tués par les chasseurs. Sur 363 pigeons emportés de Paris, il n’en rentra que 57.

A suivre …


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