Aujourd’hui je vais vous conter l’histoire de ces quelques facteurs de l’impossible, qui continuent à assurer le service public de distribution du courrier dans une zone rurale très difficile d’accès. Vous découvrirez tout d’abord ce merveilleux coin de nature et pourtant si difficile d’accès. Nous nous pencherons ensuite sur chacun de ces personnages hors du commun, et vous comprendrez aisément qu’ils méritent cet hommage. Mais plantons tout d’abord le décor …
Le cirque majestueux de Mafate à La Réunion
Sculptée par une activité volcanique millénaire, l’île de la Réunion propose des paysages vertigineux, à l’image de ses trois cirques. Disposés en trèfle autour du Piton des Neiges, Cilaos, Salazie et Mafate forment une enceinte divine. Entourés d’immenses parois rocheuses verticales, appelées remparts, ils exposent tour à tour les entrailles de la Terre au grand jour, que l’on sonde d’un regard ébahi. Mais une telle vue se mérite, il faut s’armer d’une bonne paire de chaussures pour partir à la conquête des cirques réunionnais.
Notamment en ce qui concerne Mafate, qui est le seul accessible uniquement à pied. Au milieu de cette nature accidentée, on distingue alors des habitations, accrochées comme par magie à flanc de montagne. Sur ces îlets, la vie est rythmée par les saisons et par le facteur. Et si aujourd’hui une piste d’hélicoptère a été installée pour faciliter l’accès au cirque, la tradition veut que le postier fasse, un à un, la tournée des villages. Si chaque expédition dure une semaine entière, elles ont le mérite d’offrir un cadre de travail exceptionnel, classé au patrimoine mondial de l’Unesco : du vert éclatant à perte de vue, des rivières limpides, des falaises abyssales et des cascades assourdissantes.
Les facteurs de Mafate
Lorsque La Poste décide de faire la distribution du courrier de manière régulière dans le cirque de Mafate, un peu avant la deuxième guerre mondiale, c’est à Henri Pausé, habitant de Grand Place, qu’elle confie ce travail. Henri allait une fois par semaine chercher la « sacoche » au bureau de la poste de la Possession, et pour retourner à Grand Place il disposait de l’aide inestimable d’un âne.
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Arrivé au village, il partageait avec son fils Vivien la distribution dans les autres îlets du cirque. C’est Vivien, fils aîné d’Henri, qui remplace son père pendent ses congés.
Lorsque Henri prend sa retraite en 1943, logiquement c’est Vivien qui devient le facteur du cirque mais, pour quelques mois seulement, puisque, non satisfait avec son salaire, en 1944, avec la bénédiction des deux contrôleurs de l’époque, il laisse le poste à Théophane Thomas, un autre habitant de Grand Place.
Dans ces années d’après-guerre, avec la Départementalisation et la mise en place des nouvelles institutions, le volume du courrier a considérablement augmenté. C’est à partir de 1951 que le jeune Ivrin Pausé commence à remplacer Théophane pendant ses congés bien mérités. En 1964, Ivrin Pausé est embauché comme suppléant et commence à desservir tout le cirque de manière régulière, à partir de Grand Place, puisque celui qui allait toujours chercher la « sacoche » à la Possession, c’était le vieux guerrier Théophane.
A suivre demain …
D’après des notes d’Enis Rockel