Oui vous avez bien lu : nous n’allons pas parler aujourd’hui de la fameuse rébellion des « révoltés du Bounty« , mondialement connue grâce entre autres au film de Lewis Milestone sorti en 1962 avec Marlon Brando, mais d’un épisode qui en a suivi et qui est bien moins connu.
En effet, le 30 mars dernier, l’OPT (Office des Postes et Télécommunications) de Polynésie française, a réalisé une émission commune avec l’île de Pitcairn sur le sujet, et c’est cette histoire que nous allons vous conter.
Après avoir écarté le tyrannique capitaine Bligh, Fletcher Christian et ses mutins savent parfaitement que l’amirauté enverra probablement un navire à leur recherche, et qu’il leur faut chercher une île non référencée dans les cartes maritimes. Ils atteignent ainsi Tubuai le 28 mai, dans les Australes à 450 Km au sud de Tahiti, mais y rencontrent une opposition farouche des habitants.
Le 22 septembre 1789, le Bounty arrive de nouveau à Tahiti et chacun retrouve sa compagne avec laquelle il a passé les 6 mois précédents. Mais dans la nuit du 23, le groupe des 9 marins à l’origine de la mutinerie (qui savent que le temps leur est compté), embarque en secret à bord du Bounty avec de la nourriture, 12 femmes, 6 hommes polynésiens et 1 bébé pour quitter la baie de Matavaï à tout jamais à la recherche de leur île perdue et salvatrice. Les 14 marins qui resteront à Tahiti seront effectivement facilement repris, deux ans après la mutinerie, par le navire Pandora spécialement envoyé à leur recherche depuis l’Angleterre.
Qu’advint-il alors de Fletcher Christian et de ses comparses sur le Bounty ? Trouvèrent-ils leur île paradisiaque pour fonder leur nouvelle colonie ? En fait, leur destin ne fut jamais connu pendant 19 ans. Mais en 1808, un capitaine américain fut surpris de découvrir sur la petite île de Pitcairn, située à 2500 Km au Sud Est de Tahiti, une communauté de femmes et d’enfants parlant anglais. Il réalisa qu’il venait de résoudre le mystère des mutins du Bounty quand il rencontra le seul survivant des mutins : John Adams, qui vivait entouré de plusieurs femmes polynésiennes toutes issues du groupe d’origine et d’un grand nombre d’enfants.
Adams lui raconta comment le Bounty était arrivé à Pitcairn. Ils débarquèrent du bateau tout ce qui pouvait leur être utile, et le brûlèrent dans un immense brasier le 23 janvier 1790.
Mauatua, Faahotu, Mareva, Puarei, Tetuahitea, Teehuteatuaonoa, Teio, Teraura,Tevarua, Tinafanaea,Toofaiti, Vahineatua, Sully … Tels sont les noms des douze femmes et de la petite fille qui se trouvaient à bord du Bounty lorsque le navire arriva au large de l’île Hitiaurevareva désormais connue sous le nom de Pitcairn.
C’est à ces femmes dont les noms ont été oubliés, éclipsés par l’histoire de leurs compagnons mutins, que ce timbre rend hommage. Enlevées à leurs familles et amis, compagnes forcées d’hommes parfois violents, elles ont néanmoins patiemment construit la vie de la communauté de cette île perdue au large de l’archipel des Gambier, faisant les choix qu’elles considéraient les meilleurs pour le bien-être de leurs enfants. Sur place, elles ont reconnu les plantes comestibles, celles que l’on peut tresser pour les toitures, celles qui guérissent, et celles que l’on peut battre pour en faire du tapa, étoffe si précieuse dans leurs îles.
En 1790, la mort de deux d’entre elles déclencha une série d’évènements violents qui ne s’arrêtèrent que trois ans plus tard, mais, femmes fortes, elles ont su défendre leur indépendance dans les moments de crise, allant même jusqu’à tenter quitter l’île où leurs compagnons s’étaient entretués. Grâce à l’une d’entre elles, Teehuteatuaonoa, nous en savons davantage sur les circonstances dans lesquelles la communauté de Pitcairn est née. Celle-ci livra sa version de l’histoire, de leur tentative d’installation sur Tubuai à leur départ précipité de Tahiti jusqu’à leur arrivée et leur installation dans leur nouvelle terre d’accueil loin des limiers britanniques. Teehuteatuaonoa parvint finalement à quitter l’île de Pitcairn en 1817 à bord du baleinier Sultan en partance vers le Chili. Elle, la rebelle de Pitcairn qui ne laisse aucune descendance, retrouva finalement Tahiti où elle est enterrée…
En 1838, ces femmes en avance sur leur temps sont les premières au monde à voter, 70 ans avant les désormais célèbres suffragettes. C’est à ces femmes oubliées de l’histoire que ce timbre est dédié. Cette émission commune avec l’île de Pitcairn intitulée « Les vahiné du Bounty » illustre la soirée de fête où les douze vahinés et la petite Sully se sont rendues sur le Bounty qui mouillait dans la baie de Matavai. Pitcairn islands émet sur le même thème « women of the Bounty» une série de trois timbres illustrant le lendemain de fête loin de Tahiti, la mise à feu du Bounty condamnant les vahiné à rester sur l’île, et la vie qui reprend son cours sur ce rocher perdu dans le Pacifique.
Deux anecdotes pour terminer :
- Chaque 23 janvier sur Pitcairn est célébré le « Bounty day » où une réplique du fameux bateau est déposée sur l’eau et embrasée, célébrant ainsi l’arrivée de ses premiers habitants.
- Marlon Brando restera marqué par ce film « Les révoltés du Bounty » : Tarita, la Tahitienne qui interprète Maimiti, l’amour du lieutenant Christian, alias Marlon Brando, deviendra sa troisième épouse. Il achètera alors Tetiaroa, une petite île au large de Tahiti, dont il est toujours propriétaire aujourd’hui.
J’espère que vous aurez apprécié cette petite histoire ! Laissez vos commentaires …
Un vrai roman que cette saga des révoltés du Bounty
Une série de timbres magnifiques
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