Le 63è Congrès Régional 2017 du GRAPB réunira les 27 associations fédérées à Vern sur Seiche les 3 et 4 juin prochains. A cette occasion seront proposés des timbres et souvenirs rendant hommage à La Chalotais, personnage illustre de la Bretagne que je vous invite à découvrir ci-après.
(3ème partie)
L’Affaire de Bretagne
Gravure de La Chalotais – J.J. Hubert 1760 – château de Versailles
Qu’est-ce que l’Affaire de Bretagne ? Après la guerre de Sept ans le Roi ayant des dettes voulait des impôts plus élevés. Rien de plus simple. Le contrôleur général eut l’idée d’augmenter les taxes qui faisaient partie des redevances traditionnelles composant le domaine royal. Le domaine était comme la propriété de la couronne. Le Roi en jouissait sans avoir à demander le consentement des Etats de la province, ce qui n’était pas le cas des autres charges fiscales.
Le problème qui se posa fut celui-ci : Le Roi pouvait-il augmenter les taxes de son domaine librement ? Ces augmentations dépendaient-elles uniquement de lui comme le fond primitif ? Ou, au contraire, devaient-elles, comme tout impôt nouveau, être soumises au consentement des Etats ? Cette dernière opinion était celle des Etats. L’opinion opposée était celle professée par le ministère qui entreprit de lever effectivement et de sa seule autorité les taxes en litige.
Les États ayant refusé de voter les impôts extraordinaires demandés par le gouverneur au nom du roi, La Chalotais prit la tête d’une opposition où le Parlement se rangea aux côtés des États, interdisant la levée d’impôts auxquels les États n’auraient pas consenti. L’annulation de cet arrêt par le roi entraîna en mai 1765 la démission de 85 membres du Parlement de Bretagne.
Les douze magistrats qui n’ont pas démissionné sont alors menacés. Le ministre Saint-Florentin est lui-même destinataire de courriers anonymes injurieux. Une enquête met alors en cause le procureur général du parlement, La Chalotais, alors âgé de 64 ans, qui aurait été trahi par son écriture. Dans la nuit du 10 au 11 novembre 1765, cinq magistrats du parlement de Bretagne sont arrêtés, parmi lesquels les procureurs généraux Louis René de Caradeuc de La Chalotais et son fils Anne-Jacques-Raoul de Caradeuc. Pour ses défenseurs, La Chalotais devient la victime de l’arbitraire ministériel et du despotisme monarchique.
Prison, exil, et réhabilitation
Gravure de La Chalotais – Mémoires de M. de La Chalotais
La Chalotais fut enfermé au château du Taureau, près de Morlaix, puis au couvent des Cordeliers de Rennes mais, par crainte que sa popularité ne rendît difficile cette détention, on le transféra au château de Saint-Malo.
Il écrivit quatre mémoires pour se disculper. L’un d’eux se terminait ainsi : « Fait au château de Saint-Malo, 15 janvier 1766, pouvant à peine avoir quelques livres, m’en ayant été enlevés concernant la procédure criminelle. Écrit avec une plume faite d’un cure-dent, et de l’encre faite avec de la suie de cheminée, du vinaigre et du sucre, sur des papiers d’enveloppe de sucre et de chocolat. ». Voltaire écrit à d’Alembert à ce sujet : « Vous pensez bien, mon vrai philosophe, que mon sang a bouilli quand j’ai lu ce mémoire écrit avec un cure-dent, ce cure-dent gravé pour l’immortalité. Malheur à qui la lecture de cet écrit ne donne pas la fièvre ! ».
Les juges n’osèrent pas le condamner sur la base d’expertises en écriture. Louis XV décida alors d’évoquer l’affaire devant le Conseil qui exila La Chalotais à Saintes (mai 1767). Cette sentence augmenta la fermentation des esprits. Philosophes, parlementaires, Jansénistes soutinrent que La Chalotais était victime de la vindicte du duc d’Aiguillon et des Jésuites. Des lettres-patentes du 5 août 1769 arrêtèrent le cours de la justice pour étouffer l’affaire et les parlements de mettre en cause le pouvoir du roi d’empêcher la justice. Le Roi ayant accepté de rappeler les parlementaires bretons qui avaient démissionné, le Parlement se réunit et réclama le retour des deux La Chalotais.
En 1774, au changement de règne, Louis XVI rappelle La Chalotais d’exil et en décembre 1776 décide par lettres patentes d’ériger la terre de Caradeuc en marquisat. La Chalotais est donc bien devenu en une dizaine d’années un authentique symbole politique. Les défenseurs des libertés bretonnes l’exalteront tout au long du XIXe siècle.
Un timbre, une enveloppe, une carte postale et un collector sur La Chalotais sont proposés par PHILAPOSTEL Bretagne à cette occasion. Cette souscription est ouverte à tous, adhérent ou non : c’est ici.
A suivre …