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Timbre République Française n° 1 chez Y&T                                                

Notes : Timbre de l'ex-colonie Française d'Indochine - Lettre R-D correspondent
à : R = M. Richaud gouverneur de l'Indochine et D = M. Demars directeur des
Postes à Saïgon.  Type COMMERCE


Créateur  : Alphée Dubois      G
raveur : Louis Eugène Mouchon

Vente au public : 1889 / 1892 (date de retrait de tous ses timbres) 
Valeur faciale : 5 centimes (c. de piastre) sur 35c. (c. de franc)
Taille :  ?        Dentelure : 14 x 131/2        Quantité : ?
Couleur : violet sur jaune or - surcharge carmin
Imprimé en typographie
Affranchissement :  ?


 


DES HISTOIRES DE TIMBRES-POSTE
UNE AUTRE FACETTE DE SEDANG

Beaucoup de livres et revues ont plus ou moins dénigré le Royaume éphémère de Sedang dirigé par Marie 1er et sûrement avec raison.

Mais pendant ce temps, que ce passe t-il en France?
Que pense la France d'un tel royaume?
Que peuvent bien écrire les médias à ce sujet?

Après cette lecture, peut-être, réviserons-nous notre point de vue, à chacun de voir et de saisir l'importance de connaître tous les faits.



Ici, sur la carte nous visualisons en rouge le Royaume de Sedang.




1) Contexte

A cette époque Sadi Carnot, président de la jeune république, lutte contre l'affaire du canal de Panama. En effet des pots-de-vin encaissés par certains ministres et des banquiers, donnés par de riches financiers, ainsi que des travaux sous évalués, provoquent la faillite des entreprises et les travaux sont abandonnés. Cette conséquence ébranla fortement le gouvernement.
Suite à cela l'affaire Dreyfus prend de l'ampleur et le Boulangisme terrorise plus ou moins la France. La presse qui depuis peu à une totale liberté amplifie plus ou moins ces actualités.

Mais certains évènements montrent aussi une France plus ou moins insouciante, les ailes du Moulin Rouge tournent pour la première fois, les colonies françaises sont à leurs apogées, depuis peu la gratuité de l'enseignement primaire laïc oblige à trouver des fonds pour le financement de l'école devenue de surcroît obligatoire.
Une nouveauté extraordinaire s'offre à Paris; une exposition internationale avec l'inauguration de la Tour Eiffel.

Et pour les philatélistes, la première carte postale illustrée se vend dans quelques magasins de la capitale.

Ces faits avèrent une France, bien que blessée par une certaine gangrène financière et politique, reste fière de ses nouvelles techniques, de son savoir et des plaisirs que peut lui offrir la vie, avec à côté des hommes travaillant très dur pour nourrir leur famille.

Et Le Royaume de Sedang est bien loin, très loin!...


Timbre République Française n° 991 chez Y&T                       
Sadi Carnot président de 1887 à 1894

Créateur et graveur : Raoul Serres

Vente au public du 12 juillet au 6 novembre 1954
Surtaxe pour la Croix-Rouge
Taille : 21,46 x 36     Dentelure : 13      Quantité : 25 timbres par feuille
Couleur : Brun foncé
Imprimé en taille douce
Affranchissement carte postale pour l'étranger
 

   
2) Présentation du Royaume des Sedangs

L'Indochine se développe considérablement, déjà existe un réseau ferroviaire dans le sud du pays partant de Hanoï, vers la frontière de Chine. Cette même ligne descend vers le nord, rejoint Tha-Pé ville sur le bord du Mékong en traversant le Laos. Et de là, fait intéressant, le gouverneur Richaud projette de continuer ce trajet en traversant le Royaume des Sedangs et rejoindre la mer de Chine Méridionale vers un port important.

Dans ce Royaume habitait un peuple, les Moïs. C'est un vaste plateau désertique, appartenant en principal au Laos, qui descend lentement vers les riches plaines du fleuve le Mékong. Soixante-dix villages, voir plus, résident le long des affluents et rivières qui alimente ce fleuve.

Courageux et travailleurs, ces habitants cultivent la terre pour subvenir à leurs besoins quotidiens, mais la plus grande partie de leurs temps consiste à extraire du sol un minerai de fer de qualité. Ensuite, ils fabriquaient des armes qu'ils troquaient avec d'autres peuples généralement contre des tissus et parfois des denrées alimentaires.

      


Quelques scènes de la vie des Moï, ces photos provenant de la BNF
permettent de bien visionner le plateau sur lequel
ils vivent.

3) Louis David, alias Mayrena, alias Marie 1er dit "Roi des Sedangs"

Né le 31 janvier 1842, à Toulon, Louis David, fils d'un capitaine de Frégate se destinait à poursuivre comme son père une carrière dans la marine.
Mais il échoua, lamentablement aux examens du Borda, et voulant "faire bonne figure", il s'engagea comme simple matelot. Il réussit à monter en grade, se retrouve second maître et il part en expédition en Cochinchine de 1863 à 1867. Démissionnaire, il se retrouve en 1870 à Paris, au moment de la déclaration de guerre et se retrouve capitaine des mobiles du Var.
En 1880, le gouvernement lui demande d'explorer la Malaisie, arrivé sur place en Cochinchine, le gouverneur Constans, ne sachant qu'en faire et pour s'en débarrasser l'envoie dans des contrées peu connues et il arrive chez les Sedangs. 

Mais il voyage avec une lettre de recommandation de la part du gouverneur, lettre qui lui permettra d'avoir tous les soutiens locaux, résidents, missionnaires et même de l'évêque.

Sans cette missive, il est possible de penser que rien n'aurait pu se faire. Il partit avec une centaine de coolies, qui en arrivant sur les lieux s'enfuirent. De nouveau les missionnaires lui apportèrent un soutien, et l'accompagnèrent dans les villages Moï.                              


Notre aventurier est un homme de belle prestance, avec physique agréable pour l'époque, il mesure 1,85 m, en France il a reçu pour ses actes de bravoure la légion d'honneur.
Notons que l'objectif officiel de sa mission, consiste à recueillir des informations susceptibles de figurer à l'exposition internationale de Paris.

Il régna sur les Moï grâce au stratagème suivant:
Mayrena sait que les Moï
utilisent des flèches empoisonnées au curare, aussi il circule parmi ce peuple avec une cotte de maille.
Une journée on le mit au défi, et des guerriers tirèrent sur lui par trois fois, bien sûr, les flèches tombèrent à terre sans le toucher.
Le lendemain l
es Moï utilisèrent sur lui son propre pistolet, mais comme cette demande s'effectua la veille, Mayrena dans la nuit remplaça le plomb des balles par des boulles de coton, il mit dans sa bouche à leur insu la partie en plomb et les crachats devant les chefs Moï.

Ces êtres, ignorants des techniques militaires, trouvèrent ainsi en lui, un chef protégé des dieux. Ils se sentaient invincible avec un tel 
personnage à leur tête.

De nombreux sites racontent ce qu'il réalisa dans son royaume comme par exemple :
- Une devise : "Jamais céder, toujours s'aidant"
- Une constitution avec 13 articles
- Un service postal
- Une armée de 25 000 hommes
- Une douane
- Des décorations au nombre de trois.
Etc....



4) Côté France
Voici le récit du livre Timbre-Poste de décembre 1924. (Note de l'auteur, "il ne s'agit pas de l'Echo dirigé par la maison Yvert et Tellier")

Voici de Mayrena à Paris au commencement de 1889, il a des tractations avec deux ou trois personnalités connues du monde philatélique et en avril 1889, on peut lire dans l'Echo de la Timbrologie l'entrefilet suivant:
"Nous apprenons de source officielle que le royaume de Sedang, dont le souverain est comme on le sait, notre compatriote M. de Mayrena (alias Marie 1er) vient d'entrer dans l'Union postale universelle. Le modèle du timbre est tout prêt et la commande ne tardera pas à être remise à l'atelier de fabrication des timbres de Paris. Nous en parlerons plus longuement dans notre prochain numéro".
[....] Le numéro suivant de l'Echo est muet, il faut laisser un peu hâleter les collectionneurs, mais le journal de Juin donne enfin pâture aux désirs suscités par l'annonce de cette nouvelle émission.
" Les timbres que nous avons annoncés en avril viennent d'être émis. Suivait la description que nous arrangeons. [.....]

Voyons ensemble ces timbres.
Ils ne possèdent pas de classement dans les catalogues car jamais ils n'ont été reconnus et donc sans valeur nominative.

Descriptif:
- Au centre écusson royal portant un tigre d'or sur champ d'azur
- Sur les côtés, un fond ligné avec l'inscription " DEL SEDANG" (Royaume de Sedang)
- Aux quatre angles une couronne posée en biais
- Partie haute la valeur faciale en chiffre
- Partie basse rappel de la valeur en chiffre ou en lettres  accompagnée de la valeur monétaire
- Taille : 20 x 25
- Dentelure : 11 pour le premier tirage en 1888   -   11 x 111/4 pour le 2ème tirage en 1889
- Impression en lithographie : 1er tirage à Shanghaï    -   2ème tirage à Paris

-


bistre violet vert rouge
bleu jaune rose La valeur en Math est
égale à 10 centimes.

La valeur en Mouk est
égale à 1 franc.

La valeur en piastre
($) est égale à 5 francs
 
Merci à Corailphila pour ce complément d'information
 
vert
 
bleu
 
rose
Ces timbres
appartiennent à
la 2ème série, ils se
distinguent par
un trait d'union
(ou non) dans la
valeur monétaire
 en partie basse

Puis l'article continuait par ce dithyrambe prosaïque :
" Il n'est pas besoin de rappeler l'épopée de ce hardi Français M. de Mayrena qui a conquis un royaume sans tirer un seul coup de fusil. Le royaume de Sedang compte environ 250 000 habitants, les chefs de famille sont chasseurs et guerriers, les autres hommes s'occupent surtout des travaux des champs, ils cultivent le riz, le maïs, le coton, le tabac. Les productions naturelles sont la badiane, le benjoin, la cire; et enfin l'oeil de chat et l'or se rencontrent dans des mines assez nombreuses" Note en bas de page "On n'oubliait pas l'or, qui a sur le public une influence si grande".

Ainsi présenté, cela avait l'air un pays tout prêt pour un négoce considérable et dont la correspondance était une nécessité absolue. D'ailleurs, les décrets organisant la Poste allait suivre et l'Echo de la Timbrologie avait la bonne aubaine de les publier. [....]

Cela sentait le business de bien près, mais dans le numéro suivant éclatait la justification de l'émission : c'étaient les fameux décrets.
L'ECHO de la TIMBROLOGIE de Juillet 1889 ayant pu grâce à ses relations élevées dans le monde diplomatique, se procurer des décrets établissant le service des Postes dans le royaume de Sedang, s'empressait de la publier, de telle sorte qu'on ne pouvait pas mettre en doute l'excellence de ses informations, heureux lecteurs !





Mais voici le chef-d'oeuvre du genre paru dans l'ECHO de la TIMBROLOGIE du 20 Juillet 1889; nous ne donnons qu'un extrait de cet article pour éviter les longueurs, mais savourez je vous prie les phrases que nous citons :
" Le dernier numéro de l'ECHO a annoncé l'émission de timbres-poste du royaume de Sedang, émission prévue et pronostiquée depuis quelques temps déjà par des personnes un peu au courant des affaires de l'extrême Orient.
Les grands-maîtres patentés et brevetés de la Timbrologie, dont l'arrêt doit faire loi, ont examiné gravement la chose et doctement ont conclu que de nombreux doutes  les obligeaient, tout au moins provisoirement, de classer ces timbres dans le royaume de la fantaisie et on a donné à entendre que l'on devait même les ranger dans le royaume de la spéculation, ces timbres ayant été imprimés à Paris, les postes de Sedang, n'existant pas, le royaume étant plus problématique et son souverain par suite aussi."
[........] Cependant il fallut bientôt déchanter. L'ECHO de la TIMBROLOGIE insérait bientôt cette note qui dut briser le coeur  (ou le porte monnaie de son directeur)  :
" A la suite de la polémique et pour clore la discussion qui menace de s'éterniser et de tourner à l'aigre, nous reconnaissons que les timbres que M. de Mayrena a fait mettre en circulation sont MORT-NES.
Nous n'en persistons pas moins à dire  que si l'ex-roi était retourné dans ses états, comme il l'avait promis l'authenticité de ces timbres n'aurait pu donner lieu à aucune contestation car personne ne pouvait l'empêcher d'établir un service des postes pour l'intérieur de son pays et d'employer à cet effet  telle sorte de timbres qu'il lui aurait plu. Il n'est pas indispensable de faire partie de l'UPU pour cela.
Pour conclure nous tenons à certifier que nous avons vu et examiné de près tous les décrets officiels publiés et qu'ils représentaient un caractère d'authenticité indéniable"







Publicité de M. Frémy pour la vente de timbres du royaume de Sedang, qui d'ailleurs avait engagé quelques capitaux espérant ainsi faire fortune.






5) Côté Indochine

- Qui Nhom
Marie 1er se déplaçait officiellement dans cette ville importante. Emotions et grandes joies se déployaient dans les rues. Sa majesté condescendait à regarder des "petit'gens". Sa visite consistait surtout à chercher des capitaux pour soi-disant exploiter les grandes richesses de son pays.
Un nommé Lemire sûrement un éminent personnage de cette ville donne un repas officiel en son honneur, et on peut aussi le supposer une certaine somme d'argent.

- Hanoï
Son objectif consiste à rencontrer le Résident général de l'Annam Tonkin, et malgré de nombreux articles dans la presse locale, il n'arrive pas à convaincre le bien-fondé de ses démarches.

- Hong-Kong
Dans ce territoire anglais, l'accueil change les notoires s'occupent de lui, comme étant un véritable roi. Le Times de Londres, le gouverneur de Hong Kong, parent d'éloges Marie 1er. Il repart avec un capital de 20 millions  prêté par la Charteredbank.


6) Fin de son royaume
Elle arrive à grand pas, après une fausse traite importante, il est délaissé par la France, maintenant l'Angleterre, aussi il se tourne vers l'Allemagne pays contre lequel il avait combattu et gagné la Légion d'Honneur. Plus aucun pays ne veut de lui.
La presse s'empare de l'affaire, interrogeant les différents protagonistes qu'il a grugés.

En Janvier 1889, il repart pour la France et vers la fin du mois de  Février, Paris accueille en héros Marie 1er, au point qu'un grand magasin lance une mode en son nom, la pouf Mayrena.

En déplacement en Afrique il rencontre un Belge richissime qui lui apporte une somme conséquente en échange du tiers de ses bénéfices qu'il réalisera en retournant dans son royaume.

Mais le retour s'avère impossible car les autorités, toutes affolés par sa venue, l'empêchent d'accéder à son royaume, il se trouve bloqué à Singapour, débité il s'embarque pour la petite île de Tioman où il mourra soit d'un empoisonnement ou d'une balle. Rien n'est encore confirmé.

Voilà donc une histoire qui laisse à réfléchir, car les autorités françaises pouvaient dès le départ bloquer la situation, mais le timbre mis en entête nous permet de comprendre que le commerce passe avant tout, aussi, sait-on jamais ce que ce pseudo monarque, s'il avait réussi à rendre riche son royaume, ce qu'il aurait pu apporter au pays. Il est logique de penser qu'à partir du moment où Marie 1er revient de Hong Kong avec 20 millions dans ses poches, les industriels y ont vus une belle aubaine, dans ce territoire encore français. Bien souvent l'avidité des humains fait oublier qu'un roublard reste un roublard, mais ... quand il devient trop gênant il faut s'en débarrasser.

7) PROLOGUE ajouté le 31/102013
Lorsque l'on examine son histoire à la loupe, beaucoup de points restent obscures. 
Voici le résultat des dernières recherches effectuées, elles ne viennent pas de France, mais de la Belgique.
On se rappelle la version officielle: 
"Le gouverneur Constans l'envoie ne sachant qu'en faire" (3ème titre). La réalité subjugue, tellement elle est différente.
Voici ce qu'écrit J. Desrousseaux, grand spécialiste de l'Indochine.
En 1886, Auguste Pavie part en mission au Laos. En 1890, il a convaincu les Laotiens de devenir protégés français. Les Siamois (pays voisin) ont des vues sur le Laos, et y installent des antennes, notamment des bureaux de poste dans le nord à [.......] Inquiets, de la mission de Pavie, ils envoient une mission vers l'est du Laos, prenant des Allemands comme associés. Le gouverneur de la Cochinchine charge un ex-capitaine français, Marie David, de repousser cette mission par n'importe quel moyen, mais en précisant  qu'en cas d'incidents diplomatique il sera désavoué. David réussit à refouler la mission, interceptée à Attopeu (sud-ouest du Laos). Puis il se proclame "Marie 1er [.....]. Le gouverneur général  de Hanoï l'expulse sans ménagement. [.....] De nombreux détails de cette curieuse aventure étaient secrets. [.....] trame historique trouvé dans un rapport d'époque des services secrets.

D'autres éléments impressionnent :
Rappelons une nouvelle fois la version officielle : "Il régna sur les Moï grâce au stratagème suivant" (3ème titre dans l'encadré).
Encore une fable inventée par le gouverneur en place. Il aurait simplement sauvé la vie du fils d'un chef Moï et celui-ci pour le récompenser lui donna sa fille Bïa comme épouse. Cette dernière ayant beaucoup de douceur, il en fut très amoureux. Elle lui donna un fils et une fille.
Je me posais la question, pourquoi les autorités laissèrent Marie 1er s'autoproclamer Roi des Sedangs. Nous pouvons ajouter une autre réponse : Le territoire des Moï restait difficilement pénétrable. Ils se laissèrent uniquement séduire par cet homme, cela donna donc, une ouverture pour coloniser ses "sauvages". Marie 1er adopta leur coutumes, leur moeurs, s'habilla comme eux et gagna ainsi leur confiance.

Pour ceux qui s'intéressent aux timbres d'Indochine, j'ai l'impression que cette histoire nous réserve encore bien des surprises.



PATJOA



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